Haiti Liberte
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Edition Electronique |
Vol. 10 • No. 26 • Du 4 Jan au
10 Jan 2017 |
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Vol. 8 • No. 33 • du 25 Février au 3 Mars 2015 |
Réveil patriotique tardif de la société civile haïtienne ! |
Berthony Dupont |
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EDITORIAL |
La situation en Haiti reste grave puisqu’aucune solution n’a encore
été trouvée aux principaux problèmes auxquels nous sommes
confrontés. Aussi longtemps que la société haïtienne reste inactive,
passive pour ne pas dire démissionnaire face à certains évènements,
laissant aux dirigeants politiques le soin et le temps d’agir à leur guise
et de faire ce que bon leur semble pour plaire aux différents patrons
ou commanditaires internationaux, la situation restera toujours tendue.
Même, elle devrait évoluer de mal en pis.<p>
Il y a de cela 5 ans, justement un mois après le séisme du
12 janvier 2010, le gouvernement Préval-Bellerive n’avait trouvé
d’autre thérapie pour le peuple que de lui offrir le traditionnel carnaval,
invitant les masses populaires à danser leur misère, pour oublier
la tragédie sismique ; alors que des gens étaient encore sous des décombres.
Ce fut la plus haute preuve d’insouciance nationale, celle de
dire que le peuple haïtien «ne négocie pas son carnaval» ! La société
civile a accepté et elle a dansé. Même les catastrophes naturelles ont
servi à certaines autorités à maintenir un prétendu visage humain alors
qu’ils échappaient à leur devoir de responsables devant l’opinion
publique !<p>
Un autre aspect de nos problèmes et qui continue encore à être
à l’ordre du jour, c’est que nous réagissons toujours après les évènements,
parce que nos pendules ne sont jamais à l’heure. La faute est
que nous vivons loin de la réalité vivante du pays ; un handicap qui
parfois nous empêche d’être ponctuels dans nos actions. Ainsi nos
réactions tardives sont tout justes pour la galerie, sans aucune importance
majeure pouvant changer le cours des choses.<p>
C’est le mercredi 11 février que la nouvelle de la pendaison de
notre compatriote en République dominicaine est apparue timidement
dans la presse. Ce crime odieux, accompagnant l’humiliation faite au
bicolore haïtien mériterait après tant d’autres actes anti-haïtiens, une
riposte vigoureuse et rigoureuse de la part de l’Etat haïtien d’abord,
suivie massivement par la population. Ce qui n’a pas été fait, parce
nous ne voulions pas gâcher la fête carnavalesque. Et nous avons
dansé et nous nous sommes saoulés pendant deux jours gras comme
si rien de grave n’était arrivé à notre Nation ; jusqu’à ce que survienne
aux environs de deux heures du matin, le Mardi 16 Février, un
tragique incident par la négligence de nos dirigeants, et qui a fait un
tas de morts et de blessés. C’est alors seulement que le pouvoir a jugé
nécessaire de ne pas continuer le défilé, preuve que suivant les circonstances,
toute fête même populaire, même «non négociable» peut
être stoppée ou annulée au moment opportun.<p>
A l’heure actuelle, tout le beau monde semble mobilisé et une
grande manif est annoncée, certes ; mais à quelle fin ? A n’en pas
douter, Martelly et le gouvernement de Paul seront les bienvenus
parmi les manifestants ; vu que l’objectif ressemble beaucoup plus à
une parade qu’à une réponse politique aux actes racistes qui se développent
en territoire voisin.<p>
Mais si nous avions des dirigeants sérieux, responsables ayant
un objectif bien déterminé, une dignité à défendre, si nous n’avions
pas des mendiants et des vendeurs de patrie à la tête du pays, la
plus grande manifestation haïtienne en solidarité avec les victimes
en RD eût été l’annulation du carnaval 2015 à cause de ce dernier
assassinat crapuleux, en mobilisant toute la population à la manière
d’une vaste contre-offensive, quoique symbolique, mais à l’échelle
nationale de façon à conscientiser les masses sur ce que concoctent
les terroristes de l’autre partie de l’ile. C’eut été un message clair à nos
détracteurs et la plus grande protestation pour les actes odieux de ces
mercenaires contre leur propre frère dominicain et les haïtiens. C’était
impératif. Malheureusement, c’est seulement après la fête, après la
bamboche carnavalesque, tronquée du reste, que la conscience haïtienne
est revenue pour s’apercevoir de l’immense gâchis!<p>
Cette manifestation annoncée sera sans doute réussie en quantité
de participants ; mais quelle sera sa portée ou son sens politiques,
si elle n’a pas l’allure d’une véritable insurrection généralisée de la
population pour dire Non à la misère programmée qui envoie nos
compatriotes en République voisine ? Il nous faut également dénoncer
la dégradation des conditions de vie de l’immense majorité
de la population sous l’effet d’une exploitation à outrance au profit
des multinationales. Il y a aussi l’écart sans cesse grandissant entre
les privilégiés du cercle des comploteurs, étalant ostensiblement leurs
richesses et le petit peuple de nos bidonvilles.<p>
Magnifique de montrer notre nationalisme ; mais qu’allons nous
faire contre le pillage des deniers publics qui s’accroit, la corruption
qui gangrène l’Etat, et les nouvelles bourgeoisies qui oppriment et qui
se font les contremaitres du néo-colonialisme. Il ne s’agit pas uniquement
de montrer notre foi patriotique, mais de prendre position contre
les gaspillages qui se font pour les bamboches carnavalesques alors
que le peuple ne peut même pas manger. Tous ces évènements sont
rattachés à un même lien structurel et le ver est déjà profondément
enfoui dans le fruit pour légaliser le racisme et l’oppression ! Nos
premiers agresseurs ou les vrais responsables des assassinats sont
tous ceux-là qui violent notre souveraineté, occupent notre territoire,
interviennent dans nos affaires internes, mènent des campagnes de
déstabilisation, concoctent des coups d’état, empêchant notre peuple
de jouir de son droit fondamental. Est-ce dans cette perspective, que
le parlementaire dominicain Abel Martinez, Président de la Chambre
des députés a invité lors de la visite d’une délégation de parlementaires
américains présidée par le leader démocrate, Nancy Pelosi, à
aider au nécessaire à l’absence de développement économique et de
stabilité en Haïti, source de l'immigration clandestine massive des
Haïtiens !<p>
Après la manif, qu’est ce qui va empêcher le régime de continuer
sa politique d’exclusion des masses populaires acculées à chercher
le pain quotidien en terre voisine ? Cette protestation ne devrait
pas être uniquement un simple geste patriotique ; mais elle devrait
au moins être mise à profit pour préparer les masses populaires, en
éduquant sérieusement les travailleurs, les ouvriers et les paysans,
à préparer une offensive nouvelle, inéluctable pour démasquer les
faux prophètes surtout les acrobates opportunistes mis en service par
le gouvernement.<p>
Il n’y aura rien de nouveau, rien d’étonnant, si les manifestants
qui auront à déferler dans les principales rues du pays ne sont pas à
même de s’interroger sur le train de vie de la classe dirigeante haïtienne,
alliée de la classe dominante en RD, d’en saisir le comment et
le pourquoi et d’en tirer eux-mêmes les conclusions qui s’imposent.
La société civile s’est réveillée, en sursaut. Un réveil patriotique
louable certes, mais tardif. Qu’elle reste éveillée ! Qu’elle marche enfin
main dans la main avec les masses, faisant sienne leurs cris de
désespoir et leur soif de changement, au lieu de se complaire dans des
arrangements boiteux de circonstance avec le statu quo et le pouvoir.
Société civile, réveillez-vous pour de bon !
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