Haiti Liberte
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Edition Electronique |
Vol. 10 • No. 26 •
Du 4 Jan au
10 Jan 2017 |
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Vol. 4 No. 25 • Du 5 au 11 janvier 2011 |
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Faut-il faire des voeux? |
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Frantz Latour |
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EDITORIAL |
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Souhaiter des voeux, chaque année, c’est une
habitude, une coutume, un usage, une tradition,
un rituel, une routine, un réfl exe, une formule
automatique de fi n d’année, un élan de plume sinon
du coeur, un besoin urgent d’écrire de belles
phrases, une fi èvre de coucher sur le papier de
beaux souhaits même si au fond de soi on sent,
on soupçonne ou bien l’on sait que c’est un effort
que l’on fait pour avoir bonne conscience, pour
dire quelque chose, pour ne pas être en reste avec
le reste de l’humanité, pour satisfaire à un rite universel,
pour faire plaisir, pour être dans l’air frais
du temps des voeux, l’air nouveau, l’air de ce qui
pourrait être, de ce qu’on voudrait qui fût, l’air de
vouloir donner le ton, de se donner du courage et
du courage aux autres, l’air de nouvel an, l’air de
bonne année, heureuse année, santé, prospérité,
apye nou ye.<p>
Je pourrais par exemple parler de plein soleil de
justice, je le fais d’ailleurs depuis bien des lunes,
je l’ai fait dans un autre journal ; dans ce journal
aussi, je l’ai fait les ans passés, mais je ne peux
m’empêcher de constater qu’une éclipse cache
cette justice. Je veux bien souhaiter que vienne
le temps de revivifi er l’esprit de résistance de ce
peuple qui depuis deux cents ans tient en échec
les plans ténébreux des grandes puissances alliées
aux classes possédantes locales, ce serait un voeu
on ne peut plus progressiste. Mais ils sont un million
sous les tentes, le choléra fait des ravages, la
misère taille son banda, kote kouray pour «revivifi
er l’esprit de résistance»? Derrière mon clavier,
moi qui suis en forme, j’écris, c’est beau écrire, je
pourrais faire des souhaits, mais faut-il vraiment
formuler des voeux quand le coeur et le temps n’y
sont pas? Pour personne d’ailleurs.<p>
Du reste, je serais intéressé à faire parvenir des
voeux beaucoup plus aux masses haïtiennes percluses
de désespoir qu’à quiconque d’autre. Mais
elles n’ont pas accès au journal, yo pa kab li m.
Alors dois-je écrire des voeux seulement pour un
lectorat restreint, ou juste pour me contempler
dans le miroir de mes belles phrases; et puis est-ce
qu’elles sont belles vraiment ? Qui me l’a dit ? Les
masses qui ne peuvent pas me lire ou les membres
du staff du journal qui comme moi ont eu leur morue
sur le gril à Noël ? Vous qui me lisez, di m si sa
a bèl: il faudra que viennent des temps meilleurs
de justice, des temps meilleurs de plein soleil de
justice… il viendra le temps de ranimer la fl amme
de liberté du peuple haïtien...bla bla bla… En admettant
même que franse a bèl, il n’en reste pas
moins vrai que nou anba tutelle. Alors?<p>
Comment puis-je dire au peuple haïtien, aux
masses au plus bas de tous les malheurs, au plus
profond de la douleur, comment puis-je dire ‘‘bonne
et heureuse année’’ ?. N’avez-vous pas lu ? Heureuse
année, oui. Sauf à parler de voeu pieux,
c’est se leurrer. Car on sait que tous les paramètres
sont là qui nous disent qu’en aucune façon l’année
2011 pap kab heureuse, quelle que soit l’intensité,
la chaleur, la ferveur du souhait. Ce n’est pas seulement
avec l’amour qu’il ne faut pas badiner, il ne
faut pas non plus badiner avec les voeux, d’autant
que nous savons déjà ce qui nous attend avec cette
CIRH de malheur et la malveillance de Préval que
la communauté internationale a d’ailleurs failli
mettre dans un avion pour l’expédier aziboutou
kote chen ponn. Elle a bien raté son coup !<p>
Non. Cette année, nous allons prendre un peu
de répit, un petit souffl e comme nous autres les
Haïtiens aimons dire, rentrer en nous-mêmes, réfl
échir à ce qui est possible, scruter l’horizon, observer,
take it easy, et attendre de pied ferme les
manoeuvres de zòt, plus malin et pervers qu’on
ne le croit. Nous avons assez de réserve de courage
pour tenir le coup. L’an prochain on verra bien
s’il faut reprendre la bonne habitude des voeux de
nouvel an.
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