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Edition Electronique

Vol. 10 • No. 26 •
Du 4 Jan au 10 Jan 2017

Vol. 5, No. 19 • Du 23 au 29 Novembre 2011

Quand cesserons-nous d’être un Etat d’assistés ?

Berthony Dupont

EDITORIAL

Il faudrait certes davantage de recul pour apprécier dans son ensemble le voyage de Martelly à Cuba. En effet, il ne suffit pas simplement d’aller rencontrer les dirigeants révolutionnaires cubains Fidel et Raul Castro, de renforcer l’assistance cubaine en Haiti, pour que les fantoches réactionnaires haïtiens arrêtent le courant qui les précipitera dans les poubelles de l’histoire. Ne sont-ils pas des agents déstabilisateurs stipendiés de l’impérialisme américain et occidental? Ne sont-ils pas des instruments choisis pour assurer et étendre l’hégémonie impériale et coloniale dans le pays ? A ce compte, est-ce une apparence d’ouverture sur l’île socialiste, par opposition à la dénonciation du blocus des Etats-Unis contre le peuple cubain ? ; dénonciation importante, vu qu’aucun haïtien ne peut oublier, voire ignorer l’aide de la Révolution Cubaine au peuple haïtien, au point de se leurrer à méconnaître que depuis le coup d’Etat de 2004, nous sommes dirigés par des salauds, des escrocs à la solde de l’impérialisme. Quand même, nous avons pris note et applaudi les déclarations encourageantes de Martelly à l’égard de Cuba ; et pour ne pas laisser la vedette à Martelly, Préval pour sa part, de rectifier qu'il avait également sollicité la levée de l'embargo contre Cuba dans son discours devant l'Assemblée générale de l'ONU, le 24 septembre 2010. Bravo pour les soutiens à Cuba ! Mais en réalité, à quoi servent ces déclarations, quand on n’a pas un comportement digne vis-à-vis de son propre pays occupé, humilié, bafoué et exploité. Le peuple haïtien et le peuple cubain luttent pour une même cause. Ils ne sont que des victimes d’un ennemi commun, l’impérialisme américain. Le bon sens nationaliste et populaire rejoint ici les enseignements de l’histoire « c’est devant sa propre porte qu’il faut d’abord balayer. » Dénoncer le blocus cubain rime politiquement à mener également et directement la lutte chez soi contre les forces anti-changement et cela constitue le meilleur soutien qu’on puisse donner à tous les peuples en lutte. A n’en pas douter les chefs d’orchestre changent de temps à autre, mais la musique monotone demeure toujours la même. Ainsi, de Préval à Martelly, différentes manifestations montrent clairement, en effet, que ces valets de l’impérialisme se débattent en tout sens, de tous côtés pour faire semblant de montrer qu’ils veulent adoucir les souffrances du peuple. Mais n’ayant pas de courage, ils n’ont jamais fait ce qu’ils devraient faire, à savoir rompre les liens de domination des puissances exploiteuses, et investir dans les richesses nationales du pays tout en facilitant le développement et l’indépendance économiques en faveur de la population. En dépit de toutes ces considérations, la visite de la délégation haïtienne à Cuba conduite par Martelly, du fait des engagements de Cuba à continuer d’accompagner le peuple haïtien, a été quand même fructueuse et satisfaisante. Voyez le contraste avec le ministre des Affaires Etrangères Laurent Lamothe, fer de lance de la politique de courbette. Il s’est senti aux anges quand récemment la Thaïlande lui a remis un chèque de 1 million de dollars dont il était d’ailleurs très fier. Un million ? Une aumône à l’échelle des besoins d’Haïti. Quelle fierté peut-on éprouver à se traîner dans la mendicité, à moins d’être un indigent politique professionnel ? Ne s’est-on jamais demandé: comment Haiti a pu en arriver là ? Qui nous a déstabilisés par des coups d’Etat à répétition? Qui sont les principaux responsables de nos malheurs, vu qu’à un certain moment Haiti était un phare éclairant le monde de ses rayons de liberté, tout comme Cuba l’est aujourd’hui ? Il y en a qui ne le se sont pas encore imaginés. Si Cuba a pu arriver à ce niveau d’aide fraternelle à l’endroit d’Haïti, malgré un embargo vieux de plus de 50 ans, c’est qu’il n’y a pas d’autre alternative que son système social de développement. Alors, nous autres qui n’avons aucun embargo économique qui nous étreint, pourquoi sommes nous toujours à la dernière page du livre du développement ? Aller à Cuba c’est bien, fiers de rencontrer Fidel et Raul, c’est magnifique ; mais pourquoi nos dirigeants refusent-ils de suivre leur trace, en épousant comme eux des options concrètes de changement et de liberté, le droit de choisir notre destin, le droit à nous autodéterminer ? Le 18 novembre, dans son allocution de circonstance, Martelly a souligné que « l’indépendance d’Haïti, issue de la bataille de Vertières, n’est que virtuelle aujourd’hui avec la présence des soldats étrangers. » C’est une vérité absolue. Mais qui l’empêche de faire les corrections nécessaires en exigeant le départ des forces occupantes ? Et pourquoi aussi a-t-il conditionné le départ des forces étrangères à la création d’une nouvelle force armée ? En fait qu’est ce que vous concoctez, Monsieur le président ? Nous ne sommes pas contre l’armée en soi, mais ça dépendra de quelle sorte d’armée vous allez établir. Et en regard de vos origines sociale et politique, en aucune façon, vous ne sauriez créer une armée nationale, progressiste, voire révolutionnaire à l’image de l’Armée indigène. Aussi, cette démangeaison de votre part à créer une armée qui ne peut être que dans l’intérêt de votre classe sociale ne nous inspire aucune confiance. Là où le bat blesse le plus, c’est que la classe dominante n’affiche aucun orgueil nationaliste et patriotique; elle est plus heureuse de se savoir assistée que d’essayer de réaliser quelque chose pour sortir le pays de cet état de misère et de pauvreté dans lequel ses patrons l’entretiennent. En somme, tous les dirigeants haïtiens refusent de tirer une leçon de l’expérience cubaine contrairement à ce que certains pays de l’Amérique Latine font aujourd’hui dans leur propre contexte. Ce n’est pas d’aujourd’hui que des experts cubains nous accompagnent mais nous piétinons à cause d’un mal qui ronge encore notre pays, au point où il faille accepter l’imposition d’un Président et d’un Premier ministre. Ce passage ci-dessous, d’un éditorial du journal le Nouvelliste écrit par Lemoine Bonneau, illustre bien la mentalité coloniale de cette classe d’hommes, cette bourgeoisie parasite, patripoche, il est vrai, qui n’a jamais cessé de favoriser une politique d’ouverture vers Washington dans l’espoir d’acquérir une part considérable dans la répartition des richesses du pays et pour ne rien laisser aux masses populaires : «En prenant l'initiative de condamner l'embargo des Etats-Unis contre Cuba, le président Michel Joseph Martelly s'affirme comme président d'un pays souverain…. Les retombées de la décision de Martelly de condamner l'embargo américain contre Cuba ne seront pas connues dans les jours ni dans les mois qui suivent. Au moment opportun, l'Oncle Sam donnera peut-être à l'actuelle administration haïtienne la monnaie de sa pièce. Michel Martelly avait-il discuté de l'objet de sa visite à Cuba avec le ministre des Affaires étrangères et ses conseillers en relations internationales ? Quelle est l'opportunité d'une telle initiative si l'on doit tenir compte de la coopération haïtiano-américaine dans le contexte de la reconstruction du pays, de l'investissement éventuel des hommes d'affaires américains, etc. » Avec des dirigeants de la trempe de Préval et de Martelly, encadrés idéologiquement par des journaux comme le Nouvelliste, nous n’avancerons jamais. Ce n’est pas sans raison qu’après l’assassinat de notre héros national Charlemagne Péralte lors de la première occupation américaine, le Nouvelliste avait titré en grande manchette « Le brigand a été tué, enfin les gens de bien vont pouvoir dormir en paix » Avec une telle mentalité à quand la guérison de ce mal qui ronge le pays de Dessalines ?

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