Des responsables des É.-U. en Haïti ont signalé que le
gouvernement haïtien serait incapable de gérer un tremblement de
terre catastrophique, cinq ans avant qu’une secousse
dévastatrice détruise de larges pans de la capitale haïtienne et
des villes environnantes, tuant des milliers de gens et
détruisant des centaines d’immeubles, d’après un câble secret
des É.-U., mis à disposition par l’organisation médiatique
WikiLeaks.
« La
dernière chose dont Haïti a besoin aujourd'hui est un
tremblement de terre », disait
un câble du 25 mai 2005,
rédigé deux semaines après qu’une secousse de magnitude 4,3 ait
fait trembler la capitale haïtienne, Port-au-Prince, le 11 mai.
Aucun blessé n’a été signalé et les dommages étaient très
mineurs, selon le câble.
L’avertissement concernant le séisme se trouvait dans une mine
de documents de 1 918 câbles mis à la disposition d’Haïti
Liberté par WikiLeaks.
« Un
séisme plus grave aurait des conséquences catastrophiques, étant
donné que le gouvernement d’Haïti n’est en mesure de gérer
aucune catastrophe naturelle », poursuit le câble,
avertissant qu’une secousse importante exacerberait les
problèmes d'instabilité politique, de pauvreté et de dégradation
de l'environnement.
« Une
équipe de l’OFDA [Bureau d'intervention en cas de
catastrophe] viendra à Port-au-Prince en juin [2005]
pour aider l’ambassade à coordonner les préparatifs en cas de
catastrophe, et essayer d’amorcer la coordination entre [le
gouvernement d’Haïti] et les bailleurs de fonds »,
conclut le câble.
Néanmoins, il semble que
le tremblement de terre du 12 janvier 2010 ait pris par surprise
le gouvernement haïtien, les ONG internationales, et la force
militaire de 9 000 hommes de l’ONU, qui occupait Haïti depuis le
renversement de l’ancien président Jean-Bertrand Aristide en
2004.
Les efforts de secours
et de reconstruction ont été – et continuent d'être – lents et
chaotiques, marqués par un manque de coordination et la libre
concurrence entre les divers gouvernements et organismes
internationaux.
« Je ne
comprends tout simplement pas » s’est exclamée la
présentatrice d’ABC News, Diane Sawyer, six jours après
le tremblement de terre, remettant en question la lenteur des
efforts de secours des É.-U. « Je ne comprends pas : six
jours et en plus ils ne sont qu’à 90 minutes de Miami ».
« Avec
chaque jour qui passe dans la boue et les décombres d'Haïti, les
échecs des efforts de secours sont désespérants », a
renchéri le New York Times dans un éditorial deux mois
plus tard.
Encore aujourd’hui, 16
mois après le tremblement de terre, à peine 37 % des 4,6
milliards de dollars, à l'appui de promesses de dons, ont
effectivement été décaissés, une question cruciale, étant donné
le rôle dominant que joue la communauté internationale en Haïti.
Quelques 65 % du budget du gouvernement haïtien, et toutes ses
dépenses en immobilisations, proviennent de sources
internationales.
Un rapport
commandé par l'USAID daté du 13 mai et intitulé « Building
Assessments and Rubble Removal in Quake-Affected Neighborhoods
in Haiti [Évaluation des immeubles et enlèvement des
décombres dans les quartiers touchés par le tremblement de terre
en Haïti] » estime que de 141 000 à 375 000 personnes
demeurent sans abri. L'étude, réalisée et rédigée principalement
par le statisticien et critique de l'aide humanitaire des É.-U.,
Timothy Schwartz, a calculé que le tremblement de terre a fait
entre 46 000 à 85 000. Le nombre de morts précédemment accepté,
avancé par le gouvernement haïtien, se chiffrait à 312 000.
Haïti se
situe entre deux lignes de faille importantes qui traversent le
pays, l'une sous la capitale, l'autre sous la deuxième plus
grande ville, Cap Haïtien, au Nord. Les sismologues considèrent
les deux failles « vraiment dangereuses », remarque le
câble.
« La
faille du Nord, en particulier, n'a pas vraiment libéré d
énergie depuis plus de 800 ans », met en garde le câble.
« Selon les experts, environ 4 à 8 mètres de dérapage latéral
vers la gauche a déjà été accumulé qui, s’il venait à se
libérer, risquerait d’atteindre 8,0 ou plus sur l'échelle de
Richter, sans avertissement. »
« Les conditions de sol en Haïti sont telles
qu'un tremblement de terre n'importe où dans le pays pourrait
entraîner une importante liquéfaction, où le sol se transforme
en un liquide semblable aux sables mouvants, ce qui représente
une menace considérable pour l’infrastructure comme les
bâtiments, les barrages, les ponts et les routes »,
ajoute le câble. |