Commémoration du Coup d’Etat militaire du 30 Septembre 1991
Par Thomas Peralte

Ce mardi 30 Septembre
2014, en pleine exécution d’un nouveau complot politique
contre l’ex-président Jean Bertrand Aristide, ramène le 23e
anniversaire du Coup d’Etat militaire sanglant du 29-30
septembre 1991 contre le pouvoir populaire dirigé par
l’ex-prêtre de Saint Jean Bosco. Ce coup d’Etat criminel est
survenu 7 mois et 23 jours après la prestation de serment et
l’installation du président Aristide au Palais national. Ce
coup mit momentanément fin au rêve du peuple haïtien,
incarné par l’idéal du 16 décembre 1990 : Justice,
transparence et participation. Ce Coup d’Etat planifié par
la CIA et la bourgeoisie haïtienne, béni par l’église
catholique romaine puis exécuté par les ex-Forces Armées
d’Haïti (FAD’H) a fait plus de 20 mille morts suivant les
chiffres disponibles. Le général Raoul Cédras et l’officier
autoproclamé colonel, Michel François affecté au service de
l’antigang, devant lequel l’avocat et militant des droits
humains, Yves Volel a été lâchement assassiné avec en mains
la Constitution haïtienne de 1987 où il tentait de défendre
une jeune victime, furent les principaux exécutant de ce
coup.
Selon
certains témoins, le coup d’Etat du 29-30 septembre 1991
était le plus meurtrier que l’histoire de ce pays a connu.
Tout en voulant réussir à tout prix ce coup, les militaires
ont mis en place des machines de la mort, sillonnant les
rues de la capitale dont un Rocky rouge rempli d’hommes
lourdement armés. Les soldats avaient reçu l’ordre formel
d’ouvrir le feu sur tout le monde partout il s’en trouvait.
Le président Aristide fut envoyé en exil où il a passé 3 ans
15 jours. Il était de retour le 15 octobre 1994. Le 30
septembre 1991 reste et restera le jour le plus macabre de
l’histoire du peuple haïtien.
A Cité
Soleil, l’un des plus grandes bidonvilles de la capitale
avec plus de 400 mille habitants, des partisans du président
Aristide furent tués et jetés sur des piles d’immondices,
dévorés par des chiens et des porcs au vu au de su de tout
le monde. Ce fut la violence généralisée dans le pays.
Témoin de cette scène de violence généralisée, le Dr. Frantz
Large raconte ce qu’il a vu, entendu et observé. : « Il est
évidemment absurde de vouloir comptabiliser le nombre des
victimes du 30 septembre et de ses suites. Je peux dire ce
dont j'ai été témoin. Le 30 septembre Je me suis rendu à
pied de ma résidence de Thomassin 32 à l' HUEH pour y
remplir mon devoir de médecin
En route, j’ai vu passer un camion
contenant des militaires ainsi que des jeunes gens qui
avaient l'air de Dominicains TIRER sur les passants. Devant
l'HUEH des militaires tiraient sur ceux blessés ou autres
qui essayaient de se rendre à l'HUEH. A l’hôpital c'était le
délire ; le service d'urgence était débordé. A la SOP des
militaires firent irruption à la salle d’habillage
brandissant leurs armes pour nous intimider en réclamant
qu'on leur livre tous les "'lavalasse" blessés. Faute
d'espace les patients étaient étendus sur la cour de
l'hôpital.
Je n'oublierai pas le dévouement des
médecins et je me souviendrai toujours du Dr Télémaque venu
à moto à l'HUEH courant en tous sens et opérant à bras le
corps pour tenter d'arracher à la mort quelques malheureux.
En mi-journée je me suis rendu au QG des FADH où le général
Raoul Cedras tenait une conférence de presse. Lorsque
l'officier déclara que l'armée avait dû tirer sur des
terroristes, je rétorquai "Faux vous avez tiré sur des
civils innocents" Et quand on demanda ce qui m'autorisait à
le dire je répliquai : parce que j'y étais ! Roosevelt
Jean-Francois me tira alors par la chemise pour me faire
discrètement sortir.
J’offris ensuite mes services gratuits à la
MICIVI pour soigner les victimes des tortures. Et là des
documents grâce au Ciel nous en avons ! Je sais que
l’histoire d’Haïti est à chaque page embuée de sang innocent
et qu'un crime ne saurait en absoudre un autre, mais rien
n'autorise à insulter la mémoire des martyrs du 30 septembre
et de ses suites. Ce n'est pas non plus de cette manière que
l'on parviendra à la réconciliation nationale »!
Selon d’autres observateurs avisés : « Même
avant l'investiture du nouveau président les événements
prenaient une tournure tragique. En effet, le 7 Janvier 1991
Haïti se réveillera dans le chaos. Roger Lafontant , chef de
l'U.R.N(union pour la réconciliation nationale ), avec la
complicité de l'armée,(ici , il convient de préciser que le
haut-commandement, ( le général Hérard Habraham) de l'armée
a réfuté l'idée du coup d'État du 7 janvier 1991) a pris
d'assaut le palais présidentiel. Encore une fois la
situation devient chaotique. Vers 10h p.m Roger Lafontant a
pris d'assaut la télévision pour y faire son discours. La
masse populaire, en apprenant la nouvelle envahit les rues
de la Capitale, des barricades ont été érigées, des maisons
enflammées, des macoutes décapités, devant la révolte et
l'indignation de la population, les forces armées d'Haïti
(FAD'H) et la C.I.A furent obligées de reculer.
L'implication de la petite bourgeoisie dans le coup laisse
le nouveau président perplexe, et cela ne fait qu'augmenter
sa haine envers elle. Cet évènement était le commencement du
putsch de 1991.
Le président élu entra en fonction le 7
février 1991, comme prévu, il augmenta le salaire minimum de
133%. Il mena une lutte sans pitié contre la corruption, il
amorça l'assainissement des entreprises publiques. Il s'est
entouré de ceux qui défendent les intérêts de la
bourgeoisie. Il obligea les grands commerçants à payer leur
impôt. Il promettra la justice sociale dans les prochaines
années. Le coût de la vie a baissé. Les conditions des plus
pauvres commençaient à s'améliorer. Bref, il prit une série
de mesures qui contredisaient les [intérêts] d’une
bourgeoisie assoiffée de privilèges et d’un "impérialisme"
assoiffé de domination (les Etats-Unis). Toutes ces dites
mesures économiques et sociales ne firent qu'augmenter le
mécontentement de la bourgeoisie et lui inspirèrent le
renversement du régime.
Le 1er mai, à l'occasion de la fête du
travail, le président prononça un discours sans précèdent
dans lequel il réaffirma son attachement aux masses
populaires. Il dénonça l’exploitation de ces masses, et les
incita à embêter les bourgeois dans la jouissance de leurs
biens. Il mit l'accent sur le Père "Lebrun", technique qui
consiste à brûler des humains vivants, en le qualifiant de
"l'arme populaire" et "la défense des pauvres". (Ici, il
convient de préciser que c'est mon interprétation du
discours, interprétation de la majorité de la population
d'ailleurs, peut être que le président voulait véhiculer un
autre message). Cette fois-ci c'en était trop. La
bourgeoisie décida de renverser le gouvernement. Elle et la
C.I. Commencèrent les pressions sur l'ancien General de
l'armée Hérard Abraham. Refusant d'encaisser une autre
effusion de sang le General réfuta l'idée. Mais sous la
pression de la bourgeoisie il démissionnait quelques
semaines après. Le président Aristide nomma le General Raoul
Cedras pour le remplacer. Le général entra en fonction.(
Ici, il convient de préciser que le gouvernement Lavalas
avait nommé Raoul Cédras , sous la menace des Etats-Unis de
réduire les aides Economiques, Car le General Cedras était
un agent de la C.I.A depuis 1986). Le gouvernement accepta
le compromis car il sous-estimait la capacité de l'armée. Il
n'appréhendait pas un coup de force de si tôt. Dans les
prochains mois, il prévoyait de séparer l'armée de la police
ce qui permettrait de réduire leur capacité d'agir. Mais
malheureusement ce plan a été mis en déroute par la
bourgeoisie. Quelques jours avant le jour fatal des rumeurs
de "coup d'Etat" couraient dans la capitale. Le président
Aristide a encore raté une chance de faire avorter le coup
en restant indifférent devant cette rumeur.
Le coup d'Etat du 30 septembre 1991 n'était
pas seulement le résultat de la frustration d'une
bourgeoisie. Elle était aussi le résultat d'une armée
frustrée et inquiète. En effet, le plan du gouvernement
Aristide-Préval pour les forces armées d'Haïti était clair.
Ce plan prevoyait:1) la séparation de l'armée et de la
police; 2) la modernisation de l'armée; 3) sa
décentralisation vers les zones frontalières; 3) le
désarmement complet de l'armée; et une purification de
l'armée des éléments corrompus. Tous les éléments des forces
armées, contestèrent le plan. Après tant d'années de leur
présence sur le devant de la scène politique, l'armée fut
mécontente de se voir réduire à un symbole.
En résumé, dans les mois précédents le
putsch du 30 septembre 1991, nous avions eu un président en
conflit avec un groupe social et l'institution la plus
puissante du pays. Un président qui s'est fait beaucoup
d'ennemis. Mais un président qui préférait défendre les
intérêts de la masse populaire plutôt que celle de la
bourgeoisie. Une bourgeoise mécontente des mesures sociales
et économiques. Une armée frustrée contre une réforme
nécessaire à sa survie. Une réforme qui donnerait peut être
un sens à son existence. »
23 ans
après le coup d’Etat militaire, le samedi 27 septembre
dernier, une quinzaine de policiers certains d’entre eux
cagoulés ont été placés en face des barrières d’entrée de la
résidence de l’ex-président sur le boulevard 15 octobre à
Tabarre, dans un projet fomenté par le pouvoir tètkale et
des traîtres du mouvement Lavalas. La nouvelle est tombée,
en moins de 2 heures de temps des milliers de personnes se
sont rendues à Tabarre, manifestant leurs mécontentements à
l’endroit des cinquièmes colonnes, des traîtres, de monsieur
Martelly et du juge Lamarre Bélizaire qui accepte
d’accomplir cette sâle tâche. Ce mouvement de solidarité se
transforma en manifestation anti-Martelly sur le boulevard
du 15 Octobre reliant Tabarre à Pétion-Ville, construit au
retour du président Aristide le 15 Octobre 1994.
« Nous
sommes ici pour apporter notre solidarité au président
Aristide persécuté par Martelly et ses bandits légaux. Nous
exigeons le départ de Martelly. Il refuse d’organiser les
élections, il a libéré les kidnappeurs du gang dirigé par
Clifford Brandt et les dealers de drogue. Il a voulu
assassiner le président Aristide. S’il veut assassiner le
président Aristide, il devra tuer près de 10 mille Haïtiens.
Nous sommes là pour assurer la protection de notre
président. Regardons ici en face de nous, en une fraction
de seconde, des milliers de personnes se sont précipités à
venir ici pour protéger le président, » ont déclaré des
supporteurs du président Aristide.
A l’occasion du 23e anniversaire du Coup d’Etat
criminel, sanglant du 30 septembre 1991, ce mardi 30
septembre 2014, des centaines de milliers de personnes ont
participé à une grande manifestation pacifique qui s’est
déroulée à Port-Au-Prince. Il était environ 11 heures quand
la manifestation a démarré devant l’église Saint-Jean Bosco,
les manifestants ont sillonné les rues de la Saline avant
d’emprunter la route de Delmas. La Police a barricadé toutes
les routes qui auraient permis aux manifestants de se
diriger vers la route de l’aéroport pour se rendre à Tabarre
où se trouve la résidence du président Aristide, qui était
la destination des manifestants. Ils furent obligés de
longer la route de Delmas. Arrivées à Delmas 33, ils se
dirigèrent vers Tabarre en direction de la résidence du
président Aristide. Au niveau du carrefour Fleuriot, des
cordons de la Police leur ont empêché l’accès devant la
maison du Dr Aristide. Suite à la résistance des
manifestants, les policiers ont fait usage de gaz
lacrymogène et de l’eau grattée pour disperser la foule.
C’était la même chose par devant la maison du président
Aristide où des centaines de manifestants s’étaient établis.
Vaudré Abellard, membre de la Fondation 30 septembre de
Lovinsky Pierre Antoine, l’un des manifestants, avait inhalé
du gaz lacrymogène; des élèves, des résidents de la zone ont
également été victimes de la brutalité des policiers.
Cette situation paralysa toutes les activités de la zone. |